Une compagnie du 32e d’Infanterie s’installe à Réaumur en 1831

Une compagnie du 32e d’Infanterie s’installe à Réaumur en 1831

Une compagnie du 32e d’Infanterie s’installe à Réaumur en 1831
(Propos recueillis dans les n° 28, 29 et 32 de l’Hirondelle de la Paroisse de l’année 1934)

Quelqu’un savait-il qu’en 1831 et pendant quelques années suivantes, Réaumur devînt le siège d’une petite garnison ? Ces renseignements sont dus à l’obligeance de Madame Phelippeau, qui les a trouvés dans des papiers de famille.

En 1831, le Maire de Réaumur, M. Audé est prévenu qu’une compagnie du 32e de Ligne, composée de trois officiers et de soixante dix sous-officiers et soldats va venir à Réaumur et y stationner.

L’agent comptable écrit alors à M. le Maire:

Bourbon-Vendée, le 20 mai 1831.

Monsieur le Maire,

Je suis prévenu à l’instant qu’une compagnie du 32e, forte de 70 hommes a reçu l’ordre d’aller tenir garnison dans votre commune. Je m’empresse d’écrire aux sieurs Vincendeau et Roy, boulangers à Saint-Pierre-du-Chemin, de se mettre en mesure de transporter le pain qui sera dû à cette troupe dans votre commune le 24. Ces deux boulangers ayant pris l’engagement d’y fournir le pain en cas de besoin. Je crois utile de vous donner connaissance de cette disposition pour que vous soyez rassuré sur l’exécution de ce service.
Recevez, M. le Maire, l’assurance des sentiments très distingués avec lesquels j’ai l’honneur d’être votre très humble et très obéissant serviteur.
L’agent comptable des substances militaires,

Coutance.

P.S. Les bons qui seront remis aux boulangers devront être visés par vous, je vous serais très obligé de bien vouloir les remplir de cette formalité.

Le Sous-préfet de Fontenay le Comte, à son tour écrit à la même date du 20 mai 1831:

Monsieur,

J’ai l’honneur de vous informer que je viens de diriger une Compagnie d’infanterie de ligne, forte de 70 sous-offs et soldats, commandée par un capitaine et deux officiers, elle y arrivera le 23 de ce mois, pour y stationner jusqu’à de nouveaux ordres de M. le Général commandant le dépôt. Vous veillerez, M. le Maire, à ce que toutes les fournitures soient délivrées à la troupe sur les bons de M. le capitaine commandant. J’expédie une voiture et un collier pour transporter les bagages de la Compagnie. Veuillez en faire faire le dépôt chez vous afin qu’en arrivant elle puisse les trouver.

Recevez, Monsieur, l’assurance de ma parfaite considération.

Le Sous-préfet.

Puis le Sous-lieutenant militaire:
Bourbon-Vendée, le 20 mai 1831.

Monsieur le Maire,

J’ai l’honneur de vous informez qu’une Compagnie du 32e de Ligne, composée de 70 sous-officiers et soldats, arrivera dans votre commune le 24 de ce mois et y restera jusqu’à nouvel ordre.

Je vous prie de vouloir bien prendre les mesures nécessaires pour que cette troupe puisse recevoir sur ce point le logement chez l’habitant, le pain et le chauffage.

D’après les dispositions que vient de faire le Sieur Coutance, agent comptable des vivres du département, le pain sera préparé par le boulanger de Saint-Pierre-du-Chemin, et envoyé à Réaumur aux époques des distributions. Vous n’aurez donc, M. le Maire, à vous occuper de ce service que dans le cas où il ne serait pas convenablement assuré. Quant au chauffage, les fournitures qui seront effectuées seront payées par le Sieur Sirol, préposé de ce service à Bourbon-Vendée, sur la remise des bons délivrés par le chef du détachement et visés par vous. Les distributions doivent avoir lieu à raison de 1/250e de stère par homme et par jour, ou de 1/750e de corde.

Si l’établissement d’un corps de garde était jugé nécessaire pour la sécurité de la troupe, il y aurait lieu de lui faire fournir pour chaque jour deux chandelles(1) de 15 au kilogramme. Cette fourniture serait acquittée par l’agent du chauffage désigné ci-dessus.

Veuillez agréer, M. le Maire, l’assurance de ma considération très distinguée.

Le Sous-lieutenant militaire.

(1) Une chandelle est un petit cylindre de suif, muni d’une mèche et qui servait à éclairer.

Une question assez brûlante fut agitée sur le cas où des officiers refuseraient d’aller à la messe. La question se posait en général, mais les différents corps de troupe de la région en furent avisés. Voici le contenu d’une note à ce sujet transmise au détachement de Réaumur:

Copie de la lettre écrite à M. le Général Rousseau par M. le Général Commandant la Division.

Nantes, le 30 septembre 1831.
Général,

Le ministre consulté sur le cas où des officiers refuseraient d’aller à la messe, répond le 30 août que l’ordonnance du 13 mai 1818 en ce qui concerne, ne doit pas être considérée comme imposant l’obligation d’y assister, mais comme énonçant l’ordre dans lequel ils doivent s’y rendre lorsqu’il y a lieu de les y conduire; qu’ainsi, les militaires jouissent, comme tous les autres citoyens, de la liberté religieuse garantie par la Charte, sauf dans le cas où les cérémonies du culte auraient lieu à la demande de l’autorité et où les troupes auraient reçu l’ordre formel d’y assister.
Le Général Rousseau, commandant le département, ayant écrit à M. le Général commandant la Division pour savoir de lui quel parti il avait pris relativement à la lettre ci-dessus, en a reçu l’avis que le général Pinoteau conduit habituellement les troupes du 14e et du 32e à la messe et lui-même s’y rend avec elles, que cela n’a jamais fait de difficultés et pense comme lui que cela produit un bon effet, notamment dans les campagnes. Il en a conféré avec MM. les officiers de la garnison qui tous ont été d’avis de se conformer aux avis de M. le Maréchal ministre de la guerre. Ainsi la messe continue de se dire à Bourbon-Vendée tous les dimanches et fêtes d’obligation, qu’il en sera de même dans tous les cantonnements et que MM. Les officiers sentiront combien il est important de ne pas froisser les opinions religieuses du Pays et qu’ils seront convaincus que la présence de la troupe à la messe ne peut qu’affermir de plus en plus la bonne harmonie qui n’a pas cessé de régner entre elle et les habitants.

Jusqu’en 1834…

Le cantonnement de la troupe établi à Réaumurest supprimé en 1834. Il est dit que les relations entre l’autorité communale et l’autorité militaire étaient au moins courtoises. Il y eut cependant des nuages. Une fois entre autres, M. Audé et M. Martin d’Auch, commandant alors le détachement, eurent une altercation un peu vive dont le Préfet et le Général eurent à connaître.
Le commandant avait opéré un déplacement dans le logement de quelques militaires. De son autorité il les avait logés chez les nommés Bard et Coutand. Ceux-ci refusèrent de recevoir les soldats, alléguant qu’ils n’étaient pas désignés pour le logement militaire.
Le Maire, M. Audé ayant demandé au commandant pourquoi il empiétait sur ses attributions: « parce que cela me fait plaisir », lui répondit-il. Cette réponse fut jugée inconvenante et amena des explications un peu vives entre l’officier et M. le Maire, qui se quittèrent en se menaçant l’un et l’autre de se plaindre à l’autorité supérieure.
M. le Préfet, écrivant au Général, juge ainsi le litige: M. le Maire de Réaumur a pu de son côté avoir mis un peu de vivacité, aussi lui ai-je rappelé la nécessité d’apporter dans ses rapports avec le Commandant du détachement tous les égards que les hommes se doivent entre eux; mais vous jugerez sans doute convenable de faire sentir également à M. Martin d’Auch qu’il a manqué de mesure et de convenance dans sa réponse et dans sa conduite envers M. le Maire de Réaumur.

A part cet incident de minime importance, il n’y eut que cordialité entre les deux autorités.